La récré était finie, tous les élèves rejoignaient leurs classes, tandis que de mon côté je regagnais paisiblement le dortoir, n'ayant ni heures de colles ni fête ni rien à surveiller, le calme, quoi. Je regardais dans le vide en marchant, pensant à Penny qui devait être bien en colère après ce que Pearley lui avait fait... Et dans un coin, je trouvais un cahier, un peu abimé car beaucoup d'élèves avaient du marcher dessus. Je le ramassais et le feuilletais... C'était des dessins, des jolis dessins, qui représentaient beaucoup de choses différentes, parfois abstraites. En le refermant, j'aperçus un nom, sur la couverture : Sixtine Heartlack. Tiens, ça faisait longtemps elle, c'est sur que ce n'était pas le genre de fille à se retrouver en heure de colle. Je descendis rapidement jusqu'à la salle des profs... Elle n'avait pas de cours cette heure-ci... Je partis donc à sa recherche.

Je suis tout d'abord aller frapper à son dortoir, tombant sur sa surveillante, que je ne connaissais pas plus que ça. Elle m'indiqua que Sixtine n'était pas dans le dortoir. Derrière elle, j'entendais un gros brouhaha, je vois qu'elle avait les mêmes problèmes que moi. Merde, moi qui voulait me reposer un peu, c'est raté. Je me dirigeais en direction de la cafétéria, espérant qu'elle y soit. Bien sûr, elle était déserte. Quel bordel, ce pensionnat...

Après avoir cherché partout, je décidai de sortir dans le parc me rendant compte que c'était la première fois que je mettais les pieds dans ce parc, qui était plutôt joli, pour un parc dans un internat. Il y avait de l'herbe et des arbres un peu partout. Aux bords des chemins, on trouvait des bancs en bois, disséminés un peu partout. Au centre, il y avait une fontaine en fonctionnement, avec deux trois élèves qui s'y rafraichissaient le visage. J'avais du mal à croire que cet endroit était bien dans l'internat de Riview, mais c'était le cas. J'y reviendrais certainement, sur mon temps libre...


Sixtine était en train de lire, adossée à un arbre. Elle ne s'était probablement pas rendue compte qu'elle avait perdue son carnet. C'est vrai qu'elle dessinait bien, elle devrait s'orienter vers là, plus tard, ça sera toujours mieux que surveillant, c'est sur. Je m'approchais d'elle doucement, elle était plongée dans son livre, et je ne voulais pas lui faire peur. Elle sursauta tout de même quand je l'interpella « Salut Sixtine, tu te rappelles de moi ? En fait, je marchais dans les couloirs et j'ai trouvé ce cahier, y'a ton nom, dessus. » Elle leva la tête, elle était bien coiffée, un peu maquillée mais pas trop, et elle souriait, elle avait l'air d'aller bien mieux qu'à la soirée. Elle me regardait, apparemment un peu surprise de me voir ici...

Je venais de sortir de cours de sculpture et me dirigeais vers les salles de bain, pressée de me laver après avoir passé autant de temps à tripoter de l'argile. Je me délectais finalement de la sensation de l'eau chaude qui coulait sur mes courbes nues, avant de crier d'une voix aigüe quand celle-ci passa d'un coup au froid et que je me retrouvais gelée. Je sortais vite de la douche pour découvrir que des petites malignes avaient coupé l'eau chaude pendant que je me lavais, sachant que c'était moi ou pas. Pas grave, je me coiffais, et décidais pour l'occasion de me maquiller un peu. Juste du mascara et un peu d'anti cernes parce que j'avais des poches violettes comme ça en dessous des yeux. Je m'habillais finalement avec des habits frais, un t-shirt bleu ciel et un jean comme d'habitude, avant de me diriger vers mon dortoir.

Je n'avais plus cours de la journée et devais décider que faire à présent. Je décidais de me poster quelque part dans la cour et de dessiner une personne au hasard, comme je le faisais souvent, mais malheur, je ne retrouvais plus mon portfolio. Je regardais en dessous mon lit, sur mon lit, dans mes placards, et j'étais persuadée que quelqu'un m'avait fait une farce et avait subtilisé mon bien. Je commençais à crier au hasard sur des filles dans le dortoir et finalement, les larmes aux yeux, je quittais avec mon sac en bandoulière Brontë pour me ressourcer à l'extérieur de l'établissement.

J'étais déjà venue dans le parc pour dessiner, pour parler avec d'autres personnes ou simplement pour me reposer, et je connaissais maintenant assez bien les lieux. D'un pas hardi, je descendais les escaliers pour me retrouver bien vite au milieu de la verdure, me posant au pied d'un arbre et enlevant la bandoulière en la passant au dessus de ma tête. Il fallait que je me calme, mais je ne pouvais supporter que d'autres personnes que moi et les professeurs ne voient mes dessins. Je décidais, afin de se faire, de prendre un bon bouquin et de commencer à lire. C'était un Stephen King, le genre de lecture que j'adorais et qui me tenait en alerte jusqu'au bout.

Alors que je commençais enfin à être tranquille, une voix me fit sursauter et lever la tête. En reconnaissant le surveillant du dortoir .. Dickens ou Shakespeare je ne savais plus, je souriais et surtout en voyant qu'il avait ma pochette dans les mains. Je la reconnaitrais entre mille. « Salut Sixtine, tu te rappelles de moi ? En fait, je marchais dans les couloirs et j'ai trouvé ce cahier, y'a ton nom, dessus. » « Oh mon dieu, merci ! Je le cherchais partout ! » Je prenais dans mes mains la pochette et la serrais fort, avant de la ranger dans mon sac. « Vous me sauvez, je croyais que c'était des gens de mon dortoir qui me l'avaient volé pour m'embêter. » Je poussais un soupir de soulagement et passais ma main dans mes cheveux. « Que puis-je faire pour vous remercier assez ? »

Sa réaction ne se fit pas attendre, à peine lui avais-je tendu la pochette qu'elle la serra contre elle et la mit en sécurité dans son sac à dos « Oh mon dieu, merci ! Je le cherchais partout ! ». Elle me dit après, visiblement soulagée : « Vous me sauvez, je croyais que c'était des gens de mon dortoir qui me l'avaient volé pour m'embêter. » Elle poussa un soupir et passa sa main dans ses cheveux, comme je l'avais déjà vu faire à plusieurs reprises. Elle ajouta : « Que puis-je faire pour vous remercier assez ? » Je rigolais, ça me faisais bizarre qu'elle me vouvoyait, j'avais l'impression d'être un professeur. « Tu sais, tu peux me tutoyer, d'ailleurs, je préfère. Et puis, tu n'as rien à faire pour me remercier, je l'ai trouver, je n'allais pas la garder ou te faire chanter avec. » Je réfléchissais à la dernière fois que je l'avais vu, et je me rappelait qu'elle n'allait pas trop bien à ce moment là ?« Dis, Sixtine, ça va mieux depuis la dernière fois, je veux dire, j'ai vu ce qu'il s'était passé, de loin. Quand je t'ai croisé dans les escaliers après, je me sentais mal pour toi, enfin tu vois. » Génial, j'avais réussi à m'embrouiller moi-même, j'espère qu'elle aura compris, je n'aimerais pas passer pour un idiot, surtout que j'avais eu l'impression de lui avoir fait mauvais effet à la fête, peut-être aussi parce qu'elle ne disait rien.

Il rigolait, et je ne savais pas pourquoi. En tout cas, ce surveillant m'inspirait de la confiance, et il était sympathique tout de même. Je n'avais pas encore avalé le fait qu'il ait laissé des élèves avec une bouteille d'alcool mais qu'importe. « Tu sais, tu peux me tutoyer, d'ailleurs, je préfère. Et puis, tu n'as rien à faire pour me remercier, je l'ai trouver, je n'allais pas la garder ou te faire chanter avec. » Oui, il n'y avait résolument que des gens machiavéliques pour faire une telle chose. Donc, la plupart des élèves de cet internat qui ne m'aimaient pas depuis l'affaire du premier jour. Il fallait que je m'en rappelle. « Dis, Sixtine, ça va mieux depuis la dernière fois, je veux dire, j'ai vu ce qu'il s'était passé, de loin. Quand je t'ai croisé dans les escaliers après, je me sentais mal pour toi, enfin tu vois. » Je me sentais plutôt mal tout d'un coup et perdais mon sourire. Pour m mettre à la hauteur de mon interlocuteur, je me relevais et mettais mon sac sur mon épaule. « Ce n'est rien, ça va mieux depuis enfin .. On me fait un peu la misère et on m'accuse de choses que je n'ai pas faites mais sinon tout va bien .. » Je lui faisais un petit sourire triste et me mordais la lèvre. « Vous .. Enfin tu es gentil, d'avoir voulu m'aider ou me consoler ou quoi que ce soit que .. tu aies essayé de faire. » Je remontais la bandoulière sur mon épaule et baissais les yeux au sol. « Et désolée de t'avoir dérangée. »

Peu après avoir posé la question, je me rendais compte que j'ai été un peu maladroit, j'aurais pu mieux me débrouiller, mais maintenant que c'est fait... Sixtine se leva, et m'avoua : « Ce n'est rien, ça va mieux depuis enfin .. On me fait un peu la misère et on m'accuse de choses que je n'ai pas faites mais sinon tout va bien .. » C'est vrai que ça ne pouvais pas trop s'être arrangée, mais au moins, elle ne reste pas avec les Pearley et compagnie. Elle me regardait un peu tristement et se mordit la lèvre, mais pas de la même façon qu'elle l'avait fait avec Gabriel, et je vois bien qu'elle n'a pas les lèvres gercées. J'aimerais bien la voir heureuse, lui dire quelque chose pour la consoler mais, de peur d'être maladroit, je me taisais, sentant qu'elle allait enchainer. « Vous .. Enfin tu es gentil, d'avoir voulu m'aider ou me consoler ou quoi que ce soit que .. tu aies essayé de faire. » elle baissa les yeux et finis en disant : « Et désolée de t'avoir dérangée. »

Dans ma tête, tout se bousculait, j'avais pas envie de me louper ce coup-ci. Sans trop réfléchir, je sortis rapidement : « Sixtine, tu ne m'as pas dérangée. Et puis, j'aime pas voir les gens comme ça, j'aurais fait pareil pour Gabriel, ou Pearley. Enfin, t'es une fille bien, tu mérites pas d'être traitée comme ça, et, si tu n'as rien de mieux à faire, je serais ravi d'apprendre à mieux te connaître. »

Ce surveillant était décidément bien spécial. N'importe quel surveillant normal aurait pris les deux bouteilles d'alcool, les aurait collé, n'importe quel surveillant m'aurait rendu ma pochette sans aucun mot gentil à mon égard .. Je commençais vraiment à l'apprécier, plus que la directrice de mon propre dortoir. J'aurais bien aimé être un garçon pour être avec lui, l'ambiance devait être meilleure avec lui dans les alentours qu'une vieille mégère. « Sixtine, tu ne m'as pas dérangée. Et puis, j'aime pas voir les gens comme ça, j'aurais fait pareil pour Gabriel, ou Pearley. Enfin, t'es une fille bien, tu mérites pas d'être traitée comme ça, et, si tu n'as rien de mieux à faire, je serais ravi d'apprendre à mieux te connaître. » Je regardais mes chaussures en rigolant. Apprendre à mieux me connaître ? Oui, il n'était vraiment pas comme les autres. « Bien sûr, ça ne me dérange pas et je n'ai rien de mieux à faire en effet. On s'assoit ? » Je me rasseyais dans l'herbe et jouais avec quelques brins.

« Alors, qu'est-ce qu'il y a à savoir à propos de moi .. je m'appelle Sixtine mais tu le sais déjà. Je suis en première année d'université et j'étudie l'art, j'aime particulièrement le dessin mais tu l'auras deviné .. Autrement, je n'ai pas beaucoup d'amis encore ici, je m'énerve rapidement, mais je ne suis pas une brute, au contraire. » J'avais peut-être dit un peu trop de choses. Je lançais un regard en direction de Dan et revenais vers le sol rapidement, je n'aimais pas regarder les autres dans les yeux.

Je commençais décidément à apprécier cet internat, on n'y trouvais apparemment pas uniquement des Gabriel et des Pearley. Je n'avais plus envie d'aller me coucher, Sixtine m'intriguait. Elle accepta ma proposition de faire connaissance : « Bien sûr, ça ne me dérange pas et je n'ai rien de mieux à faire en effet. On s'assoit ? » Je m'asseyais donc sur l'herbe fraiche et verte, qui me rappelais la campagne où vivaient mes grands-parents. Elle commença donc par me parler d'elle : « Alors, qu'est-ce qu'il y a à savoir à propos de moi .. je m'appelle Sixtine mais tu le sais déjà. Je suis en première année d'université et j'étudie l'art, j'aime particulièrement le dessin mais tu l'auras deviné .. Autrement, je n'ai pas beaucoup d'amis encore ici, je m'énerve rapidement, mais je ne suis pas une brute, au contraire. » Elle avait bien fait de s'orienter vers l'art, elle était douée : « Bah, faut éviter de lancer des verres sur des gens quoi. Je rigolais avant de poursuivre : Je plaisantes, je me doutes bien que t'avais une raison. Et pour le dessin, tu es très douée. » Je remarquais qu'elle fuyait souvent du regard, se concentrant sur son brin d'herbe, peut-être par timidité. J'attrapais un brin aussi et faisais noeud avec, avant de lui demander : « Et tu es arrivée ici comment ? » Il faut dire que ce n'est pas vraiment une colonie de vacances, et si on peut éviter de se retrouver dans un internat comme riview, on le fait...

Il s'asseyait à côté de moi et je prenais de grandes inspirations, histoire de profiter de l'air frais que nous avions à Riview. Pour ce qui était du cadre idyllique tout y était, et j'étais vraiment chanceuse de vivre dans un vrai palace et pas dans un de ces taudis que l'on appelait parfois internat. Mes parents nous avaient envoyé, mon frère et moi, dans le bon endroit … Ou tout du moins je commençais à le croire. Car malgré tous les incidents dont j'avais pu remarquer l'existence, il y avait toujours des petits moments de bonheur, comme celui-ci. « Bah, faut éviter de lancer des verres sur des gens quoi. » Je rigolais de concert. En fait, maintenant, cette histoire me faisait plus rire qu'autre chose. J'avais perdu mon calme, c'était vrai, et peut-être sur la mauvaise personne aussi puisque je m'étais fait plein d'ennemies du même coup, mais au moins ça avait eu pour effet de m'apaiser un peu. Je détestais les personnes comme Pearley et ce n'était pas près de changer. « J'y penserai la prochaine fois. » Il m'était de plus en plus facile de communiquer avec lui. « Je plaisantes, je me doutes bien que t'avais une raison. Et pour le dessin, tu es très douée. » Si j'avais pu rougir .. Je l'aurais fait, comme d'habitude. A la place, mon regard se dirigea vers le sol, je me passais une main dans les cheveux et je me mordais la lèvre. Satanés tics. « Merci, on ne me le dit pas souvent. » « Et tu es arrivée ici comment ? » Je poussais un soupir et fermais les yeux un moment, avant de prendre la parole. « Disons que .. Mon père a découvert que ma mère l'avait trompé avec un autre homme il y a de cela 18 ans et que j'étais l'enfant née de cette union. Ils avaient des problèmes de couple à régler alors mon frère et moi avons été envoyés ici en attendant que tout s'arrange. »

Sixtine était la, assise adossée à l'arbre, elle me racontait comment elle était arrivée dans cet internat : « Disons que .. Mon père a découvert que ma mère l'avait trompé avec un autre homme il y a de cela 18 ans et que j'étais l'enfant née de cette union. Ils avaient des problèmes de couple à régler alors mon frère et moi avons été envoyés ici en attendant que tout s'arrange. » J'étais désolé pour elle, elle avait pas eu une vie facile, apprendre que son père ne l'était pas, que sa mère trompait ce dernier. Enfin... « Et ça va, tu le vis pas trop mal ? T'as pas de chance. » J'espérai que ce n'était pas trop dur pour elle. Elle jouait encore avec son brin d'herbe, certainement en pensant à ce qu'elle venait de me dire.

« Et ça va, tu le vis pas trop mal ? T'as pas de chance. » Je prenais une grande inspiration mais cela n'empêcha pas mes canaux lacrymogènes de s'enclencher. Alors, je me dépechais d'essuyer les larmes qui coulaient peu à peu sur mes joues en espérant que cela ne se remarquerait pas, mais c'était peine perdue. « C'est assez dur, lorsque celui que tu as pris pour ton père durant toutes ces années ne t'adresse plus la parole, ainsi que ton frère, et qu'en plus, tu ne sais absolument pas qui est ton vrai géniteur .. » Je m'en voulais de pleurer à chaudes larmes comme ça et mouillais mes mains à m'essuyer les joues et les yeux de cette façon là, n'ayant aucun mouchoir. « En effet, je n'ai pas de chance. »

Ses larmes commençaient à couler à nouveau. « C'est assez dur, lorsque celui que tu as pris pour ton père durant toutes ces années ne t'adresse plus la parole, ainsi que ton frère, et qu'en plus, tu ne sais absolument pas qui est ton vrai géniteur .. » Je la regardais, un peu gêné, avant de dire sans réfléchir : « Oui, je vois... Enfin, non, je ne vois pas, parce que je ne me rappelle plus de mon père et que je suis fils unique, mais, j'imagine bien que ça doit être dur... » Quel con je faisais... Elle s'essuyait les joues et les yeux frénétiquement, certainement gêné de pleurer devant moi. Je sortais un mouchoir de ma poche, pour une fois que j'en avais, autant qu'ils servent à quelque chose. Je le lui tendais en disant : « Tu sais, tu n'as pas à être gênée de pleurer, ça arrive à tout le monde. » J'espérais, une fois de plus, que ça passerais rapidement.